PARIS, 29 juin (Reuters) - Morgan Stanley prédit un sombre avenir aux chaînes de télévision traditionnelles en Europe, estimant dans une note publiée vendredi que la prise de pouvoir aux Etats-Unis des Netflix et consorts est appelée à se propager outre-Atlantique à l'horizon des cinq prochaines années. Les analystes de la banque d'affaires américaine ont dégradé à "sous-pondérer" leurs recommandations sur l'ensemble des valeurs du secteur en Europe, aux seules exceptions du britannique ITV ITV.L et de MTG. "Aux Etats-Unis, l'atteinte par Netflix d'un taux de pénétration de 20% a été le 'point de bascule' pour le déclin de la consommation des chaînes linéaires et pour le ralentissement des revenus publicitaires", explique Morgan Stanley dans sa note. "Au rythme actuel des conquêtes d'abonnés, le taux de pénétration sera au-dessus de 20% dans chacun des pays européens en l'espace de 5 ans, dont 32% en Allemagne et 48% en Grande-Bretagne et en Suède", pronostiquent les analystes. Le succès croissant des plateformes dites OTT ("over-the-top"), pour la plupart américaines, a pour effet de réduire la durée de consommation des télévisions traditionnelles et pèse du même coup sur le montant des investissements publicitaires des annonceurs. La France, où Netflix a mis du temps pour s'imposer pénalisé à ses débuts par un catalogue jugé peu attractif et par une réglementation contraignante, ne devrait pas faire exception à la règle. Morgan Stanley prédit que la plateforme, dont ils estiment le taux de pénétration actuel autour de 9%, devrait atteindre le seuil fatidique des 20% d'ici 4 ans. Un tel scénario pénaliserait le numéro un de la télévision privée en France TF1 TFFP.PA dont les revenus sont issus à 70% de la publicité, et son principal concurrent M6 MMTP.PA , souligne Morgan Stanley. La filiale de Bouygues BOUY.PA pourrait dans l'hypothèse la moins favorable voir ses bénéfices fondre de plus de 80% face au recul des dépenses des annonceurs si elle ne parvient pas à ajuster ses coûts. LE RIVAL FRANÇAIS DE NETFLIX AU TAPIS "Le groupe a un bon bilan en termes de gestion de ses coûts mais nous pensons qu'il serait compliqué de contrebalancer une période prolongée de recul structurel de son chiffre d'affaires", estime Morgan Stanley. Si le profil de M6 est davantage diversifié, la filiale de RTL Group RRTL.DE devrait voir sa valorisation reculer à un ratio cours sur bénéfices (P/E) de 11 contre 14,2 aujourd'hui, selon les données de Thomson Reuters. A 15h33, l'action TF1 cède 2,56% à 8,935 euros tandis que M6 perd 3,61% à 17,11 euros, lanterne rouge du SBF 120 .SBF120 . Ailleurs en Europe, les allemands ProSiebenSat.1 PSMGn.DE et RTL Group chutent respectivement de 7,07% et 5,99%. Morgan Stanley voit toutefois quelques stratégies de riposte possibles, comme notamment la production de contenus locaux où les plateformes internationales pèchent, la publicité ciblée des téléspectateurs ou encore la création d'alliances entre diffuseurs à l'image de l'initiative Salto emmenée par TF1, M6 et le groupe de télévision public France Télévisions. Auditionné au Sénat mercredi, le président du directoire du groupe de télévision payante Canal+ (Vivendi VIV.PA ), Maxime Saada, avait déjà sonné l'alarme sur les perspectives de la filière audiovisuelle française. Sa plateforme de vidéo à la demande par abonnement, CanalPlay, a vu son nombre d'abonnés fondre de 800.000 à 200.000 aujourd'hui alors que les offres de plateformes concurrentes se sont multipliées dans l'Hexagone et que Netflix étoffait son catalogue grâce à son budget d'investissement massif - 8 milliards de dollars par an - dans les contenus. "En deux ans, on a été rayés de la carte sur ce marché, qui est en train de se substituer à la télévision", a-t-il dit, en pointant du doigt le caractère obsolète de la réglementation française. (Gwénaëlle Barzic, avec Marc Angrand, édité par Blandine Hénault)
Morgan Stanley prédit un sombre avenir aux TV européennes
information fournie par Reuters 29/06/2018 à 15:34
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